Sampdoria Gênes - FC Malinois : 3-0 (Journal Le Soir du 20 avril 1989)
Bien qu'aux deux tiers dépeuplé, Marassi se transforma en enfer dès le coup d'envoi de la partie sifflée par le Tchèque Stiegler. Les quinze mille tifosi de la Samp', massés derrière le but de Michel Preud'homme, faisaient du bruit pour les cinquante-huit mille spectateurs que peut d'ordinaire contenir le stade. On n'osait imaginer, du reste, ce qu'eût été l'ambiance hier après-midi si les gradins génois avaient été couverts de monde.
La minute de silence, proposée après quelques secondes de jeu au public en guise d'adieu aux victimes de Sheffield, n'en prit que plus de relief.
Un frisson parcourut l'échine des fans du foot. Puis la balle se remit à rouler sur la pelouse. Et la fièvre reprit de plus belle dans les tribunes, Mancini se chargeant de ranimer l'enthousiasme des tifosi par un débordement spectaculaire ponctué d'un centre qui sema une sacrée frayeur devant Preud'homme.
Il fallait avoir les nerfs solidement accrochés pour ne point perdre son sang-froid dans cette véritable poudrière.
Des Malinois, fort heureusement, n'en étaient plus à leur première expérience européenne. Sans quoi, on n'eût pas donné cher de leur peau!
Que de fautes!
Encouragés à mettre le pied par l'arbitre beaucoup trop permissif de l'homme en noir, les Italiens se mirent alors à commettre sur nos compatriotes des fautes qui frisaient l'agression. On ne pouvait évidemment mieux s'y prendre pour provoquer l'adversaire et le faire sortir de ses gonds.
Une fois encore, le métier et la sens aiguisé du professionnalisme permirent aux troupes d'Aad De Mos de vaincre leur peur et de contenir leur colère. Tour à tour, Koeman, Emmers, Versavel et Deferm furent couchés sans ménagement sur un gazon terriblement alourdi par les incessantes chutes de pluie des derniers jours. Impuissante à créer le danger devant le but belge, la Samp-doria n'en finissait plus de ramener la menace sur une portion de terrain abandonnée par Malines.
Preud'homme passait une première demi-heure relativement tranquille, seul un tir de Salsano, dévié en corner mérita la citation.
Comme elle l'avait redouté, la formation transalpine avait eu à composer d'entrée de jeu avec une opposition diantrement pugnace. Pagliuca avait bien failli être trompé, dès la 5e mn, par un heading de Deferm et dut se détendre, à la 7e mn, sur une reprise de Koeman, qui, à la 35e, catapulta encore un terrible coup-franc dans sa direction. Dewilde, parti seul en contre, avait été in extremis plaqué au sol par Vierchowood, sanctionné très logiquement d'un bristol jaune.
Ce raid éclair titilla les Italiens au plus profond de leur amour-propre. Il les dissuada de tout mettre en oeuvre pour inscrire, avant le repos, le but de l'espoir.
Par deux fois, Victor crut bien parvenir à ses fins. Mais ses envois frôlèrent l'objectif d'un fifrelin, au grand soulagement d'un Preud'homme qui avait été trahi par une passe en retrait beaucoup trop courte de Hofkens.
Inconscience de l'homme en noir
Une intensité exceptionnelle, le débat flirtait de plus en plus allègrement avec la brutalité. Peu avant le repos, Deferm fut ainsi bien près de se faire couper en quatre par une attaque de Cerezo, sous les yeux complaisants - ou inconscients - de M. Stiegler, l'homme par lequel prenait corps, lentement mais sûrement, la violence.
La pause survint ainsi à points donnés pour apaiser les esprits. Du moins l'espérait-on...
De fait, la Sampdoria se montra-t-elle beaucoup moins agressive, dans le mauvais sens du terme, à la reprise. Une reprise marquée, à la 52e mn, par un essai foudroyant de Versavel, un rien à côté de la cible. Malines s'était créé en première mi-temps trois fois plus de coups de coin que Gênes. L'attaque était à ses yeux la meilleure des défenses. Emporté par son tempérament, Den Boer écopa à son tour d'une carte jaune, pénalité qu'il récoltait pour la toute première fois au cours de cette campagne internationale. A l'image de tous ses partenaires, le géant hollandais ne ménageait vraiment pas sa peine pour offrir aux douze cents sympathisants malinois rassemblés dans un coin de Marassi la satisfaction suprême.
Au fil du temps cependant, la pression se fit de plus en plus intense devant Michel Preud'homme qui l'échappa belle, au cap de l'heure quand, sur centre de Mancini, Pradella et Cerezo, tout seuls devant lui, ratèrent tour à tour l'interception du ballon.
Le but de Cerezo à la 70e mn
Ce loupé valut à Pradella d'être remplacé sur le champ par Bonomi, de Mos choisissant cet instant précis pour appeler Wilmots à la rescousse, en lieu et place de Demesmaecker, manifestement à bout de souffle.
La fatigue paraissait s'emparer de tous les organismes quand, à la 70e mn, une offensive déclenchée par Mancini et relayée par Victor ouvrit une brèche béante dans l'arrière-garde belge. Brèche dans laquelle Cerezo s'engouffra à la vitesse de l'éclair. Avec une maîtrise stupéfiante, le Brésilien crucifia Preud'homme, faisant souffler l'extase sur toute la Ligurie.
Il restait vingt minutes aux Malinois pour inscrire à leur tour le but salvateur. Vingt minutes qui s'égrenèrent à une cadence affolante à la montre de De Mos, qui avait la désagréable impression de ne plus maîtriser la marche des événements.
La défaite et l'élimination apparurent toutefois irrémédiables à la 85e mn à la suite d'un coup de poignard mortel asséné, dans le dos de la défense anversoise, par Dossena. Et quand le troisième but tomba, des oeuvres de Salsano, on crut bien que Marassi s'effondrait et qu'il faudrait, une fois encore, tout reconstruire.
La joie des tifosi n'avait d'égal que la détresse malinoise.
Dure, mais implacable loi du sport...
Par JEAN-LOUIS DONNAY (Journal Le Soir du 20 avril 1989)
Source : Les archives du journal Le Soir